Le savoir de demain : aller au-delà des apprentissages théoriques

Comment optimiser les systèmes éducatifs pour favoriser le développement global des élèves? Image bannière: Shutterstock/AlesiaKan
Le savoir de demain : aller au-delà des apprentissages théoriques
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Cet article s’inscrit dans une série de contributions d’experts de l’OCDE et d’influenceurs – du monde entier et de tout secteur de la société – qui répondent à la crise du COVID-19, partageant et développant des solutions pour aujourd’hui et demain.

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Avec le PISA, l’OCDE suit depuis longtemps les résultats de l’enseignement scolaire. Toutefois, ces résultats sont loin d’être les seuls facteurs qui contribuent à la réussite des individus, des entreprises et des nations. Aujourd’hui, les employeurs sont à la recherche de personnes non seulement très compétentes dans leur domaine d’études, mais aussi ouvertes d’esprit, curieuses et créatives, qui se connaissent bien et sont dotées d’un grand sens des responsabilités, et qui sont capables de travailler efficacement avec les autres en faisant preuve d’empathie, et à même de faire face aux ambiguïtés et aux incertitudes.

Aujourd’hui, l’OCDE est en mesure, pour la première fois, de réaliser une analyse comparative de ces compétences chez les élèves de 10 ans et ceux de 15 ans. Certains résultats sont troublants. Si nous découvrions que les jeunes de 15 ans ont de moins bons résultats en compréhension de l’écrit ou en mathématiques que les élèves de 10 ans, nous nous demanderions ce qui ne fonctionne pas dans notre approche de l’enseignement scolaire. Or c’est exactement ce que montrent les résultats portant sur la créativité et la curiosité : les jeunes de 15 ans font en effet état d’une créativité et d’une curiosité inférieures à celles des enfants de 10 ans, même si cet écart varie considérablement d’un pays à l’autre. Les psychologues proposent diverses explications : les jeunes de 15 ans se connaissent peut-être mieux et se jugent de manière plus objective, et ils passent souvent par une période difficile d’adaptation à l’âge adulte. Mais cela n’explique qu’une partie du phénomène, car parents et enseignants confirment la baisse de la créativité et de la curiosité des élèves. Nous naissons tous avec une grande curiosité ; si vous êtes parent d’un garçon ou d’une fille de trois ans, alors vous savez que les enfants de cet âge remettent en question tout ce que vous dites, expérimentent tout le temps et sont toujours prêts à apprendre, désapprendre et réapprendre. Se pourrait-il que notre manière d’enseigner empêche de nourrir la créativité des enfants, en leur demandant de reproduire les vérités établies de notre époque plutôt que de les remettre en question ?

Lire « Beyond Academic Learning: First Results from the Survey of Social and Emotional Skills », qui décrit les compétences sociales et émotionnelles des élèves et leurs corrélations avec les caractéristiques individuelles, familiales et scolaires [en anglais]

Beyond Academic Learning: First Results from the Survey of Social and Emotional Skills

Autre observation intéressante : les garçons et les filles obtiennent des résultats assez différents. Les filles font état de niveaux de compétence plus élevés en lien avec l’accomplissement des tâches, comme le sens des responsabilités ou l’envie de réussir. Elles affichent en outre des niveaux de compétence supérieurs dans des domaines importants dans un monde interconnecté, comme l’empathie, la coopération et la tolérance. À titre de comparaison, les garçons ont des compétences supérieures en matière de régulation des émotions, comme la résistance au stress, l’optimisme et la maîtrise des émotions, mais aussi au regard de compétences sociales clés comme l’assurance et l’énergie. Dans chacune des villes participant à l’enquête, les élèves issus de milieux favorisés ont des compétences sociales et émotionnelles supérieures à celles de leurs homologues défavorisés dans tous les domaines mesurés. Les parents issus de milieux plus aisés pourraient investir davantage dans les compétences sociales et émotionnelles de leurs enfants ; de la même manière, les élèves plus défavorisés ont peut-être plus de difficultés, moins de possibilités et moins de soutien pour développer ces compétences.

Les compétences sociales et émotionnelles ne sont pas seulement importantes en tant que telles. Les conclusions de l’enquête montrent qu’elles sont aussi des variables explicatives importantes des résultats scolaires, indépendamment des cohortes d’âges, des matières et des villes considérées. En particulier, la curiosité intellectuelle et la persévérance sont les compétences sociales et émotionnelles les plus étroitement liées aux résultats scolaires des élèves de 10 et 15 ans en compréhension de l’écrit, en mathématiques et en art. Ces conclusions soulignent l’importance non seulement de s’engager à atteindre des objectifs prédéterminés, en dépit des difficultés rencontrées, mais aussi de cultiver une curiosité intellectuelle à l’égard d’un large éventail de sujets. Les facteurs extérieurs comme les attentes des parents ou des enseignants peuvent favoriser la persévérance, mais ils peuvent disparaître ou changer au fil du temps, alors que la curiosité intellectuelle est un puissant moteur intrinsèque. Les élèves qui font preuve de curiosité à l’égard de divers sujets et aiment apprendre de nouvelles choses sont mieux armés pour faire face aux difficultés et sont plus susceptibles d'atteindre leurs objectifs.

L’enquête ne mesure pas seulement les compétences sociales et émotionnelles, mais aussi des résultats clés en termes de bien-être. Les résultats montrent que les compétences sociales et émotionnelles des élèves sont étroitement liées à leur bien-être psychologique, même après prise en compte du statut social et du sexe. Cela se vérifie particulièrement pour la résistance au stress, l’optimisme et la maîtrise des émotions. L’optimisme est systématiquement lié à la fois à un niveau plus élevé de satisfaction à l’égard de l’existence et de bien-être psychologique dans toutes les villes. La résistance au stress et l’optimisme sont fortement corrélés à un niveau plus faible d’anxiété liée aux examens. Les élèves qui se considèrent plus résistants face au stress, plus optimistes et mieux capables de contrôler leurs émotions font état de niveaux plus élevés de bien-être psychologique.

L’environnement d’apprentissage à l’école est important lui aussi. La qualité de la relation entre les élèves et les enseignants est l’une des variables explicatives les plus importantes des compétences sociales et émotionnelles. Par ailleurs, lorsque les élèves ont le sentiment qu’il existe un climat de concurrence au sein de l’établissement et que les attentes de leurs parents ou de leurs enseignants sont élevées, on observe chez les enfants de 10 ans un niveau plus élevé de bien-être psychologique, mais aussi d’anxiété liée aux examens. Il est normal de ressentir une certaine anxiété concernant les examens, et elle peut même être utile pour se concentrer. Mais un niveau trop élevé d’anxiété peut entraîner une détresse émotionnelle et physique, et une inquiétude qui peut nuire aux résultats. Les conclusions du PISA montrent que ce n’est pas la fréquence des examens qui détermine l’anxiété ressentie par les élèves, mais plutôt le sentiment d’un manque de soutien de la part des enseignants. Lorsque les environnements d’apprentissage concurrentiels et les attentes élevées des parents et des enseignants ne s’accompagnent pas d’un soutien social et émotionnel adéquat ou de stratégies mises en place pour maîtriser l’anxiété liée aux examens, les élèves peuvent se sentir dépassés et mal préparés face aux difficultés.

Lire le rapport « Regards sur l'éducation 2021 : Les indicateurs de l’OCDE », qui met l’accent sur l’équité, en étudiant comment la scolarité, les acquis et les résultats sur le marché du travail sont influencés par différentes dimensions, comme le sexe, la situation socio-économique et géographique ou le pays de naissance

Regards sur l'éducation 2021 : Les indicateurs de l’OCDE

Tous ces éléments montrent pourquoi il importe que les systèmes éducatifs s’efforcent de favoriser le développement global de leurs élèves, sans se limiter aux seules compétences scolaires. Ils doivent prendre conscience que des compétences sociales et émotionnelles adaptées, un meilleur bien-être et des relations sociales épanouissantes à l’école peuvent faire la différence entre un bon élève et un citoyen de demain épanoui.

Regarder une vidéo d’Andreas Schleicher sur les micro-diplômes dans l'enseignement supérieur [en anglais]

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